
Sur la 1e photo, de Joann Whalen (merci), on voit un monticule de 4 cm de haut et 20 cm de large amassé à l’entrée de sa galerie par un Lumbricus terrestris, qui contient des résidus de feuilles et de tiges de maïs, de la terre et des déjections, (et même parfois des petits cailloux). Comme les résidus fibreux sont peu appétents, le ver les laisse décomposer par des microorganismes un certain temps avant de pouvoir les manger; ils sont ramollis et enrichis en azote, donc plus nourrissants; ça ressemble à un petit compost. En anglais on appelle ça « midden » (2e photo, K. Butt, merci); Marcel Bouché dit resserre, Pelosi monticule, moi je préfère amas; Odette Ménard, cabane.

Ces amas font partie de l’écosystème des vers de terre qu’on nomme la drilosphère et qui comporte aussi les galeries, les sécrétions (mucus), les matériaux en transit digestif, les déjections fraiches et âgées, les matières organiques et les graines en attente d’être consommées, des racines de plantes, des nutriments et des contaminants du sol, les microorganismes vivant dans toutes ces composantes et même les résidus d’ADN. On pourrait rajouter les plastiques, omniprésents dans les sols et les tissus des êtres vivants. (460 millions de tonnes de production annuelle, en augmentation exponentielle.) Les vers aident à les décomposer.
On reconnait d’autres fonctions à ces amas : Protéger l’entrée de la galerie de la chaleur et empêcher qu’elle s’assèche. Adapté à un sol frais, le ver respire par sa peau qui doit rester très humide; et le grand lombric enduit sa galerie permanente de mucus. Il peut y vivre pendant des années et même la laisser en héritage à sa mort. Une ouverture accélérerait chaleur et assèchement, deux ennemis des vers.
Abriter le juvénile, qui, dans ses premières semaines de vie, n’est pas assez fort pour creuser une galerie; il vit dans ce monticule et dans les galeries d’adultes; on y retrouve aussi d’autres animaux, par exemple des enchytréides, des nématodes, des arthropodes, ainsi que des vers d’autres espèces qui viennent y manger et y séjourner.
Une hypothèse : un signal aux voisins (hermaphrodites) de la présence d’un partenaire d’accouplement potentiel.
Photo 3, nombreux amas de feuilles de soya dans un champ avant la récolte, indiquant une forte population de L. terrestris.

Pour explorer le monde fascinant des vers de terre retournez dans les publications passées sur ce blog.
Denis La France, Enseignant et expert en agriculture biologique
CETAB+, Cégep de Victoriaville