J’ai tenté d’observer le comportement des vers de terre dans de petites quantités de terreau de feuilles et ça soulève des questions.
Après la glaciation du Wisconsin, il n’y avait plus de vers de terre au Québec. Ni la visite probable de Vikings, ni les échanges agricoles des Iroquoiens du St-Laurent ne semblent avoir introduit de vers chez nous. Selon toute probabilité, les vers sont arrivés principalement avec le ballast des bateaux des Français et les plants en pots.
Partout dans le monde où les blancs ont colonisé, les espèces pérégrines européennes se sont propagées. Elles sont adaptées et utiles aux agroécosystèmes d’inspiration européenne. On les trouve en Amérique du Nord et du Sud, en Afrique, en Australie, en Nouvelle-Zélande. Un peu moins en Asie, moins dans les milieux tropicaux et équatoriaux et les forêts boréales. Très souvent, elles nuisent aux espèces indigènes de vers, à cause de leurs grandes capacités d’adaptation.
Cependant, à part quelques exceptions, très peu des cultures pratiquées au Québec sont originaires de notre territoire; elles proviennent d’ailleurs dans le monde. Donc quand on choisit de cultiver ces plantes agricoles, on s’attend à ce que les espèces pérégrines s’installent et nous rendent divers services.
Dans nos forêts, des écosystèmes récents développés depuis la fin de la glaciation, elles sont considérées comme envahissantes, perturbatrices et indésirables. C’est un paradoxe avec lequel doivent vivre ceux qui s’intéressent à leur utilité agricole. Par exemple, l’accélération de la décomposition de la litière laisse le sol forestier presque nu, entraînant la disparition de certaines espèces végétales poussant sous couvert forestier et favorisant l’installation d’espèce peu désirables comme de l’érable à Giguère ou du nerprun.
Il y a de petits projets de culture dans des zones de forêts boréales. Il faut reconnaître que les principales cultures agricoles ne sont pas adaptées aux sols mor ou moder de ces écosystèmes nordiques. Les sols gagnent à être transformés en mull pour les rendre propices aux cultures agricoles. Si on introduit des vers, agents de formation du mull, vont-ils s’échapper et perturber les écosystèmes forestiers voisins? Disons que l’introduction des vers par les pneus de véhicules et par des pêcheurs qui abandonnent leurs surplus d'appât de façon négligente auront déjà fait beaucoup plus de dégâts.
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