Dans un livre sur les 100 organismes ayant le plus influencé l’évolution, What on Earth Evolved,le journaliste scientifique Christopher Lloyd classe les vers de terre au premier rang.
Malgré une foule de recherches qui démontrent l’utilité de milliers d’espèces de vers de terre connues un peu partout dans le monde, notamment dans les agroécosystèmes, il y a des situations où ils sont nuisibles.
J'ai profité du dernier samedi de juin pluvieux pour examiner mon compost domestique. Il est situé à l’entrée du jardin de légumes. Je voulais transférer des vers dans un terreau de feuilles débuté au printemps (avec un ajout de farine de plume azotée) pour le transformer en vermicompost. En français on parle souvent de lombricompost et de lombriculture. Les épigés sont des vers qui vivent dans la litière de surface et rentrent très peu dans le sol. Ils mangent très peu de terre. Dans les composts, on voit beaucoup d’Eisenia fetida qui survit à l’hiver, surtout par ses cocons.
Les scientifiques décrivent les vers de terre comme les ingénieurs du sol. Avec les racines, les fourmis, etc., ils créent un milieu favorable à la vie de TOUS les organismes vivant dans le sol. On décrit leur travail comme de la bioturbation : ils mangent de la terre, des matières organiques et les déposent ailleurs, y compris en surface du sol, mélangeant les composantes du sol. Ceci aide à créer la structure su sol. Un sol bien structuré est constitué de 50% de solides rassemblés en agrégats, entourés de 50 % d’espaces (nommés pores) partagés entre la terre et l’eau.
Je me souviens d’une chanson de Gilles Vigneault « La queste du pays » où il décrivait le creusage d’un trou de mine en terminant par : « Si t’avais vu le tas! »
EN SOL MOUILLÉ = LA GALERIE BRANCHÉE DIRECTEMENT SUR LE DRAIN!
Pour étudier les galeries de grands lombrics (L. terrestris), Kevin Butt injecte une résine qui permet de bien voir leur architecture. Il a aussi développé une méthode d’élevage pour inoculer ces animaux dans un milieu où ils peuvent être utiles, par exemple la restauration de sites d’enfouissement.
Les vers de terre sont considérés comme perturbateurs dans les écosystèmes naturels du Québec, principalement parce qu’ils accélèrent le cycle des matières organiques et la disparition des litières. Pour ces mêmes raisons qui augmentent les rendements et la qualité des sols, leur présence est considérée essentielle dans les agroécosystèmes, qui sont tout sauf naturels.
Après 33 ans en culture biologique, on espère que les sols seront bien pourvus en vers de terre. Pour vérifier, Robert St-Arnaud et Denis La France ont échantillonné les vers à la pluie le 24 mai dernier. Ils se connaissent depuis presque 40 ans alors que Denis agissait comme mentor de Robert, agronome-conseil en agriculture biologique.
À la fin de l’été 2023, j’ai fait tailler et abattre des arbres feuillus et les copeaux broyés contiennent des branches jusqu’à un diamètre de 12 à 15 cm et les feuilles. Comme il y a beaucoup de bois assez gros, on ne peut pas qualifier ça de BRF (bois raméal fragmenté). Le rapport C/N moyen dépasse 200 (200 x plus de carbone que d’azote) ; ce n’est donc pas un matériau riche qui intéressera beaucoup les vers de terre. (photo 3)
Les sols trop humides ne peuvent être travaillés mécaniquement sans faire de dommages et causer de la compaction. J’insiste là-dessus depuis 50 ans.
Mais des sols bien structurés par de bonnes pratiques, une gestion des matières organiques bien pensée, une population et une diversité d’espèces élevées de vers de terre, peuvent être travaillés à la main, beaucoup plus humides. À condition de choisir des outils d’action douce comme ce que vous voyez sur la photo et de rester debout dans les allées permanentes entre les planches cultivées où la portance est bonne.